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DelphSei - les riches heures
12 janvier 2009

Insomnies

"Rester éveillé la nuit ne signifie rien moins que vigilance, c'est une reptation sur place, visqueuse et usante."
Ernst Bloch, Traces, Paris, Tel, 1998 (1ère éd. 1959)

Il y a ces douces insomnies, oui, douces, où bien au chaud au fond de sa couette, une tendre (oui, Catherine, une tendre) fatigue nous fait jouir de ce qui reste un moment de repos et les pensées voguent calmement, au point que l'on se demande après si l'on n'a pas dormi tout de même un peu.
Et il y a ces moments de veille usants, où l'on ressasse et repasse tout ce qui angoisse, énerve, agace attriste tyrannise malheureuse colère aigrie ennuie chagrine pleure manque détresse angoisse
tout ce que l'on a (mal) fait le jour, tout ce que l'on fera demain (sassé et ressassé), oui, tout ce que l'on va faire, alors à quoi bon le faire "pour de faux" dès maintenant - pourquoi écrire ce texte en pensée, alors qu'on n'a pas de stylo, que l'on est fatigué, et là, bien sûr, les pensées vont vite, mais demain, on ne s'en souviendra pas ou mal, et l'on éprouvera d'autant plus la pesanteur terrestre ? Pourquoi préparer la liste de courses, comme si c'était compliqué, comme si l'on ne s'en débrouillerait pas bien tout seul le lendemain, comme s'il fallait une mise en condition, mise en situation, préparation psychologique ? Est-ce vraiment le moment de réfléchir aux tâches qui nous attendent et nous font peur, précisément quand on n'y peut rien ? Pourquoi remuer les pensées de boue, celles qui réveillent notre colère et notre tristesse, celles qui aiguisent notre égoïsme et notre aigreur ? Comment faire cesser cet assaut d'idées désagréables, d'images de pertes passées et à venir, d'abandon, de deuil, d'absences ?
On se doute bien qu'il se passe quelque chose dans les coulisses, que quelque chose agite et s'agite pour nous réveiller ainsi et nous maintenir dans cet état de veille. Celui-ci nous surprend au milieu de notre sommeil, étendu seul dans le noir (car on est toujours seul dans une insomnie), impuissants à repousser les attaques des autres pensées insidieuses qui s'infiltrent par la brèche ici créée.

L'on sait qu'il ne faut pas trop se croire au coin de ces bois où l'on fait de si mauvaises rencontres, mais on adhère entièrement à ce qui a toute la vérité de nos angoisses. On cherche les cailloux pointus cachés dans le matelas qui nous écartent du lit chaud de notre sommeil.

Et l'on reste incertain si ces pensées tristes sont la cause ou le produit de ces noires insomnies.

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DelphSei - les riches heures
  • Des corps dansants, heureux ou fatigués, des gribouillis dans les marges des cahiers, sur des bouts de journaux, des photos, dessins au bic, crayon, encre ou brou de noix... Un peu de texte aussi : je vous le mets quand même ?
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