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DelphSei - les riches heures
1 juin 2009

Et l'on voudrait des élèves acquis d'avance

« L’idée qu’on puisse enseigner sans difficulté tient à une représentation éthérée de l’élève. La sagesse pédagogique devrait nous représenter le cancre comme l’élève le plus normal qui soit : celui qui justifie pleinement la fonction de professeur puisque nous avons tout à lui apprendre, à commencer par la nécessité même d’apprendre ! Or, il n’en est rien. Depuis la nuit des temps scolaires, l’élève considéré comme normal est l’élève qui oppose le moins de résistance à l’enseignement, celui qui ne douterait pas de notre savoir et ne mettrait pas notre compétence à l’épreuve, un élève acquis d’avance, doué d’une compréhension immédiate, qui nous épargnerait la recherche des voies d’accès à sa comprenette, un élève naturellement habité par la nécessité d’apprendre, qui cesserait d’être un gosse turbulent ou un adolescent à problèmes pendant notre heure de cours, un élève convaincu dès le berceau qu’il faut juguler ses appétits et ses émotions par l’exercice de sa raison si on ne veut pas vivre dans une jungle de prédateurs, un élève assuré que la vie intellectuelle est une source de plaisirs qu’on peut varier à l’infini, raffiner à l’extrême, quand la plupart de nos autres plaisirs sont voués à la monotonie de la répétition ou à l’usure du corps, bref, un élève qui aurait compris que le savoir est la seule solution : solution à l’esclavage où nous maintiendrait l’ignorance et la consolation unique à notre ontologique solitude. »

Daniel Pennac, Chagrin d’école, Paris, Folio, 2007, p.268

   

***

   

Et l'on voudrait des élèves acquis d'avance, des élèves habités par les mêmes désirs que nous, pénétrés des mêmes valeurs que nous, déjà persuadés de la valeur, notamment, et de l'intérêt de ce qu'on va leur transmettre (et ce serait l'aune à laquelle on mesure tous les autres élèves). En est-on toujours sûr d'ailleurs, de cet intérêt ? (Des absurdités au sein des "programmes" et des normes à inculquer avant les examens futurs). Bien sûr, il y a toujours ce mystère de l'intérêt et de la beauté qu'on ne découvre qu'après. Si l'on pouvait déjà apprendre le bonheur qui peut se trouver derrière l'obstacle surmonté et qu'il n'y ait pas que sa seule aridité ! Mais l'écueil le plus grand n'est-il pas le doute, doute projeté et doute intégré, sur la capacité même de le surmonter ? Croire sans preuve, pour soi et pour l'autre en face de soi. Une histoire de confiance en somme...

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Commentaires
DelphSei - les riches heures
  • Des corps dansants, heureux ou fatigués, des gribouillis dans les marges des cahiers, sur des bouts de journaux, des photos, dessins au bic, crayon, encre ou brou de noix... Un peu de texte aussi : je vous le mets quand même ?
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